Company
  • Einblicke

Apéros “fun & pro” : quelles sont les limites ?

Authors
Guy Castegnaro
Founder & Managing Partner - Luxembourg
CASTEGNARO
Luxembourg
06.12.24
2

Comment concilier culture d’entreprise et libertés fondamentales ?

 

Dans un récent arrêt, la cour d’appel de Paris a annulé le licenciement d’un salarié sur le fondement de la liberté d’expression.

 

Le salarié a été licencié en raison de son refus de participer aux valeurs « fun and pro » et à la « culture de l’apéro » prônées par son employeur dans le cadre d’une soi-disante « culture d’entreprise ».

 

Il s’agissait notamment de la nécessaire participation aux séminaires et aux pots de fin de semaine.

 

La culture de l’apéro faisait partie des valeurs de l’entreprise et était même considérée comme un marqueur professionnel auprès des clients.

 

Cette affaire est intéressante car elle montre que l’employeur, à travers ses techniques de management, ne peut pas s’immiscer de façon excessive dans la vie privée de ses salariés sous prétexte du lien de subordination voire d’une culture d’entreprise.

 

Selon la Cour, les valeurs de l’entreprise trouvent leur limite dans la liberté d’opinion et d’expression du salarié.

 

Ainsi, en refusant la politique de l’entreprise basée sur le partage de la valeur « fun & pro » et ses « excès », le salarié a exercé sa liberté d’expression et d’opinion sans commettre d’abus.

 

La Cour a fondé sa décision sur l’article 10 de la Convention européenne des droits de l’homme en vertu duquel toute personne a droit à la liberté d’expression. Elle aurait également pu invoquer le droit à la protection de la vie privée.

 

De même, les juridictions du travail luxembourgeoises admettent généralement que les critiques d’un salarié formulées à l’encontre de l’organisation de travail mise en place par l’employeur ne constituent pas, en soi, un motif de licenciement.

 

La liberté d’expression, bien que relevant d’un droit fondamental du salarié et consacré par l’article 10 de la CEDH, doit néanmoins s’exercer dans un cadre respectueux des droits et libertés d’autrui, qu’il s’agisse de l’employeur ou de tiers.

 

Par ailleurs, un salarié qui s’opposerait de façon catégorique et systématique à toute participation à des événements extra professionnels organisés par son employeur devrait cependant se poser la question de savoir s’il a trouvé le poste qui lui convient.

 

Il est important de rappeler ce qui fonde la culture d’entreprise. Il s’agit des éléments qui composent l’identité de l’entreprise, son esprit, son fonctionnement, ses valeurs, ses croyances, son attitude, etc.

 

Les limitations éventuellement imposées par l’employeur au nom de sa culture d’entreprise ne peuvent en principe être ni générales ni absolues, et la culture d’entreprise n’est pas à elle seule un gage de proportionnalité.

 

En clair, l’employeur ne peut pas demander tout et n’importe quoi aux salariés, au seul motif que la société souhaite appliquer et protéger sa culture d’entreprise.

 

Pour trouver un équilibre entre les libertés individuelles et la culture d’entreprise, les entreprises doivent mettre en place des politiques claires et transparentes qui respectent les droits des salariés tout en promouvant les valeurs et objectifs de l’organisation.

 

Il est important d’encourager la diversité, l’inclusion et le respect mutuel au sein de l’entreprise, tout en veillant à ce que les salariés se sentent libres d’exprimer leurs opinions et leurs idées.

 

La communication ouverte, le dialogue et la prise en compte des besoins et des préoccupations des salariés sont essentiels pour maintenir un équilibre sain entre les libertés individuelles et la culture d’entreprise.

de_DE_formal