Quel en sera l’impact sur les plates-formes numériques luxembourgeoises ?
Les pays membres de l’Union Européenne sont enfin, après quelques échecs de négociations, parvenus à s´entendre sur le sort des travailleurs des plates-formes numériques, comme Uber ou Deliveroo. Ce secteur emploie actuellement environ 28 millions de personnes à travers le monde et pour 2025 ce nombre est estimé à environ 43 millions !
Quel est l’enjeu de ce débat ?
Le principal enjeu consiste à définir la nature exacte de la relation entre les plates-formes et les personnes qui transportent des clients, des repas ou d’autres marchandises en utilisant d’une part des moyens électroniques tels qu’un site web ou une application mobile et d’autre part des systèmes de surveillance ou de prise de décision automatisés.
La version finale de la directive délègue aux États membres les décisions clés concernant les travailleurs des plates-formes.
La version finale de la directive exige toujours que chaque État membre crée une présomption légale selon laquelle une relation contractuelle entre une « plateforme numérique de travail » et un « travailleur de plateforme » est une relation de travail dans certaines circonstances.
Cependant, plutôt que de prescrire ces circonstances, la directive renvoie aux pratiques nationales en matière de détermination de l’existence d’une relation de travail subordonnée.
Une fois la présomption établie, il incombera à la plateforme numérique de travail de prouver que la relation contractuelle en question n’est pas une relation de travail telle que définie par la loi.
Il y aura donc une certaine harmonisation à l’échelle de l’UE, mais pas autant que ce qui avait été envisagé précédemment.
Quel impact pour le Luxembourg ?
Le Code du travail, dans la partie consacrée au contrat de travail, ne contient aucune définition de la relation de travail salariée.
Les juridictions du travail luxembourgeoises renvoient généralement à la jurisprudence de la CJUE lorsqu’il s’agit de déterminer l’existence d’un contrat de travail. Selon la Cour européenne, le contrat de travail est une convention par laquelle une personne s’engage à mettre son activité à la disposition d’une autre personne, sous la subordination de laquelle elle se place, moyennant une rémunération.
Le lien de subordination se caractérise par l’exercice par l’employeur de trois sortes de pouvoir sur le travailleur à savoir un pouvoir de direction, un pouvoir de contrôle et un pouvoir de sanction.
Si ces trois éléments sont réunis, le travailleur concerné est considéré comme étant un travailleur salarié soumis aux dispositions du code du travail luxembourgeois.
Quelles sont les autres obligations issues de cette directive ?
Les travailleurs des plates-formes et leurs représentants auront le droit d’entamer une procédure pour examiner leur statut, et les inspections du travail auront l’obligation de le faire lorsqu’elles pensent que les travailleurs des plates-formes ont été mal classifiés.
Chaque État membre devra également mettre en place un « cadre de mesures de soutien », des orientations ainsi qu’un régime permettant des « contrôles et des inspections » des plateformes par les autorités compétentes.
Le texte final de la directive envisage également un rôle plus important pour l’implication humaine dans la prise de décision vis-à-vis des travailleurs.
Par ailleurs, les plateformes devront prendre des mesures préventives pour protéger les travailleurs contre la violence et le harcèlement.
Finalement, les travailleurs des plateformes bénéficieront d’un nouveau droit à la portabilité des données : celui de recevoir toutes les données à caractère personnel générées par leur prestation de travail, y compris les évaluations et les avis, de les transmettre ou de les faire transmettre à un tiers, y compris à une autre plateforme de travail numérique.
Que se passera-t-il maintenant ?
La directive devra être transposée en droit national dans un délai de deux ans à partir de la publication au Journal officiel. D’ici là, plusieurs étapes doivent encore être franchies : le texte final doit être produit dans toutes les langues, et le Parlement européen et le Conseil doivent tous deux l’adopter.
On peut toutefois raisonnablement penser que, même si cela prend un peu de temps, la directive est maintenant en passe de devenir une loi.